La loi Sapin II relative à la transparence, à la lutte contre la corruption et à la modernisation de la vie économique du 9 décembre 2016 crée un statut protecteur des lanceurs d’alerte. Cette protection n’est toutefois applicable que si les auteurs des signalements entrent bien dans le cadre défini par cette loi.
Définition des lanceurs d’alertes qui bénéficient de la protection de la loi Sapin II :
Il s’agit d’une personne physique qui révèle ou signale, de manière désintéressée et de bonne foi des faits dont elle a eu personnellement connaissance et qui constituent :
– un crime ou un délit ; ou
– une violation grave et manifeste d’un engagement international ou d’un acte unilatéral d’une organisation internationale pris sur le fondement d’un engagement international ; ou
– une violation de la loi ou du règlement ; ou
– une menace ou un préjudice graves pour l’intérêt général.
Exception : La révélation ou le signalement de faits, information ou documents couverts par le secret de la défense nationale, le secret médical ou le secret des relations entre un avocat et son client ne rentrent pas dans le cadre la protection des lanceurs d’alerte créée par la loi Sapin II.
A qui l’alerte doit-elle être adressée ?
La loi Sapin II prévoit une « gradation » dans le signalement de manière à préserver à la fois l’efficacité du signalement et l’image de la personne qui fait l’objet de la dénonciation :
1.En premier lieu : signalement en interne au supérieur hiérarchique, à l’employeur ou tout référent spécialement désigné par l’employeur.
2. En second lieu et en l’absence de « diligences » de ces personnes dans un « délai raisonnable » pour « vérifier la recevabilité du signalement » : signalement externe à l’autorité judiciaire, à l’autorité administrative ou aux ordres professionnels
Exception : En cas de danger grave et imminent ou en présence d’un risque de dommages, ces autorités peuvent être saisies directement sans passer par les personnes mentionnées au 1°.
3. En troisième lieu, et en l’absence de traitement de l’alerte par les autorités mentionnées au 2° dans un délai de trois mois, le signalement peut être rendu public.
Exception : En cas de danger grave et imminent ou en présence d’un risque de dommages irréversibles, le signalement peut être rendu public immédiatement sans passer par les étapes 1 et 2.
Dans tous les cas, il est possible de saisir directement le Défenseur des Droits afin d’être orienté vers l’organisme approprié de recueil de l’alerte.
Attention : Le non-respect de cet ordre de signalement peut avoir pour conséquence d’exclure l’auteur du signalement de certaines mesures protectrices des lanceurs d’alerte.
Quelle protection pour les lanceurs d’alerte ?
Les lanceurs d’alerte au sens de la loi Sapin II qui respectent les procédures de signalement prévues par la loi ne sont pas responsables pénalement en cas d’atteinte à un secret protégé par la loi (sauf le secret de la défense nationale, le secret médical ou le secret des relations entre avocat) dès lors que cette divulgation est nécessaire et proportionnée.
Ces lanceurs d’alerte bénéficient du régime de protection contre les discriminations au travail dès lors qu’ils ont respecté l’ordre de signalement évoqué ci-dessus (article L.1132-3-3 nouveau du code du travail).
Les personnes faisant obstacle à la transmission d’un signalement encourent des sanctions pénales (un an d’emprisonnement et 15.000 euros d’amende).
Obligation de mettre en place des procédures de recueil des alertes
Cette obligation a un champ d’application très large puisqu’elle concerne toutes les « personnes morales de droit public ou de droit privé d’au moins 50 salariés ».
Un décret en Conseil d’Etat précisera les modalités concrètes de mise en place de ces procédures. La loi prévoit déjà des garanties de confidentialité de l’identité des auteurs du signalement, des personnes visées par celui-ci et des informations recueillies.
Attention : En cas de mise en place d’un traitement automatisé de données à caractère professionnel, il conviendra de veiller au respect de la loi du 6 janvier 1978, et plus précisément de l’autorisation unique AU-004 de la CNIL.
A noter que la loi Sapin II prévoit un dispositif spécifique d’alerte dans le secteur bancaire et financier et impose aux grandes entreprises de mettre en place un véritable programme anti-corruption comprenant non seulement un dispositif d’alerte professionnelle, mais aussi la mise en place d’un code de conduite et la formation du personnel le plus exposé.